Introduction
Si les chevaux se reposent majoritairement debout, ils ont également besoin de périodes de repos couché pour atteindre la phase la plus profonde du sommeil dit « paradoxal ». De récentes études montrent que les chevaux peuvent rester plusieurs jours sans se coucher mais que la privation de sommeil altère leur santé, jusqu’à les faire tomber. Ceci amène à bien réfléchir à l’aménagement de l’espace de vie des chevaux.
Sachant que les hébergements en groupe sont de plus en plus préconisés aujourd’hui pour le bien-être des animaux, Linda Kjellberg et ses collaborateurs suédois comparent les comportements de repos des chevaux hébergés en groupe à ceux hébergés seuls en box, pour déterminer la taille optimale de la zone de repos d’un hébergement en groupe permettant de garantir le repos de chaque individu.
Méthode
10 chevaux mesurant entre 1,62 m et 1,74 m au garrot sont hébergés dans une écurie ouverte. Ils sont filmés quatre fois en continu durant 72h, dans quatre configurations différentes donnant chacune accès à une surface de repos plus ou moins grande par cheval (Tableau 1).
Les chevaux sont identifiables individuellement grâce à des symboles fluorescents sur leur couverture (saison froide). Ainsi, le temps de repos couché (en décubitus sternal et latéral) et le nombre de fois que le cheval se couche sont relevés pour chaque individu.
Les résultats sont mis en relation avec la surface de repos disponible par cheval pour déterminer quelle configuration a le plus d’impact sur le repos couché.
Tableau 1.Les quatre configurations des zones de repos testées.
Lors du traitement 4, les températures trop élevées n’ont pas permis l’utilisation des couvertures, empêchant l’identification des individus sur les vidéos (*).

NDLR : Pourquoi se référer à la situation en box ? Ce protocole nous pose question. Certes, le cheval hébergé seul en box a accès à toute la surface du box en comparaison avec les chevaux hébergés en groupe qui doivent “partager” un espace commun. Mais aucune surface par cheval en groupe ne correspond à celle du box, ce qui rend la comparaison difficile. Également, bien que les chevaux ne restent au box que la nuit, il nous semble que des biais existent. Si selon les auteurs, les températures sont sensiblement les mêmes en box (non chauffés) et dans les abris, l’impact de l’isolement social ou l’accès au fourrage durant la nuit restent des biais possibles.
L’étude s’appuie sur de précédents résultats : entre autres, ceux de Raabymagle and Ladewig (2006), qui montrent que le temps passé en decubitus sternal et la fréquence des temps de repos augmentent, plus la taille du box est grande. Kjellberg et Rundgren (2010) observent quant à eux que la durée du temps couché diminue dans des box de petite taille. Nous supposons que les auteurs ont cherché à effectuer une comparaison par rapport au mode d’hébergement le plus répandu aujourd’hui, afin de mettre leurs résultats en perspective avec la littérature.
Résultats
La taille de l’espace disponible pour se coucher et la présence des congénères semblent avoir un impact sur le comportement de repos couché des individus du groupe.
Temps couché
Dans la plus petite configuration en groupe (8m² / cheval), la moyenne sur 24h du temps passé couché (sternal + latéral) des 8 chevaux observés est moitié moins importante (69 min) que dans le box (145 min., p-value p = 0,0001) et que dans la configuration 3 (130 min., p = 0,001).
La même observation est faite concernant le temps passé en décubitus latéral, position permettant de rentrer en sommeil paradoxal. On remarque également de gros écarts entre les individus (barre des minimum-maximum dans la figure 1).

Fréquence des couchers
Le nombre de fois moyen où le cheval se couche obtient des variations similaires avec une différence significative entre la configuration de 8m² / cheval (2,1 fois +/- 0,3) comparée au box (3,5 fois +/- 0,3, p = 0,01) et à la configuration 3 (4 fois +/- 0,5, p = 0,001).
Dans les trois configurations de groupe, environ un quart des temps de repos couché sont interrompus de force par un autre cheval qui vient perturber le sommeil de son congénère en s’approchant trop près (menace, grignotage de la paille à proximité, contact…).
Discussion
À la lumière de cette étude, les auteurs estiment que dans un hébergement en groupe, l’espace nécessaire au repos de chacun est supérieur à celui dans un box. Tenant compte de la taille des animaux, de la stabilité du groupe et de la personnalité des individus, l’espace de repos optimal se situerait entre 8m² et 18m² par cheval.
De nombreuses questions restent ouvertes : vaut-il mieux plusieurs petits espaces de repos ou un seul suffisamment grand ? Un seul passage d’accès ou plusieurs ? Quels sont les impacts d’interruptions du sommeil forcées par un autre congénère ? Que révèlent les grandes différences individuelles observées dans l’étude ?
NDLR : Bien que le protocole nous semble contenir des biais et que le nombre de chevaux impliqués soit trop faible pour tirer des conclusions, les questions soulevées et les résultats individuels sont intéressants et encouragent à poursuivre les recherches sur le sujet.



